En Guyane, une action collective en justice pour protéger le Maroni de la pollution au mercure due à l’orpaillage illégal
« Aujourd’hui, les Wayanas réclament justice, cela fait trop longtemps que ça dure », a affirmé avec calme et détermination Michel Aloïké, chef coutumier du village de Taluen, lors d’une conférence de presse, mercredi 17 janvier, à Cayenne, pour annoncer le dépôt d’un recours en « carence fautive » de l’Etat dans sa lutte contre l’orpaillage clandestin, devant le tribunal administratif de Guyane.
Depuis trente ans, les Wayanas – plus de 1 200 Amérindiens vivant au bord du fleuve Maroni, à Maripasoula, dans le sud du territoire – sont victimes des orpailleurs illégaux brésiliens, dans le parc amazonien de Guyane. « On voit de plus en plus de cours d’eau pollués, un nombre inestimable de garimpeiros [chercheurs d’or, en portugais du Brésil] et on a peur, car il y a la délinquance, la drogue, l’alcool, la prostitution », ajoute le quadragénaire.
Le chef dénonce également la pollution au mercure, produit toxique interdit dans l’orpaillage légal en Guyane depuis 2006, utilisé par les garimpeiros pour récupérer l’or extrait illégalement, puis rejeté dans la nature. « Tous les villages et beaucoup de nos poissons sont contaminés », déplore Linia Opoya, une habitante de Taluen, présidente de l’Association des victimes du mercure haut Maroni.
143 sites clandestins recensés
Malgré les opérations de lutte contre l’orpaillage clandestin engagées par l’Etat, intensifiées avec le dispositif Harpie depuis 2008, les chercheurs d’or illégaux sont toujours là : en août 2023, 143 sites clandestins ont été recensés dans le parc amazonien, dont 60 % à Maripasoula, et 1 500 kilomètres de cours d’eau pollués comptabilisés. « La France ne se rend pas compte que nous, le peuple wayana, nous sommes en train de mourir, explique Michel Aloïké. Il est temps qu’elle prenne ses responsabilités », plaide-t-il.
Michel Aloïké et Linia Opoya portent le recours contre l’Etat avec six associations engagées dans la protection de l’environnement (Wild Legal, Maiouri Nature Guyane) ou de la défense des Amérindiens (Association des victimes du mercure haut Maroni, Solidarité Guyane, Coordination des organisations des peuples autochtones, Jeunesse autochtone).
Dans leur mémoire, les requérants demandent au juge d’« enjoindre à l’Etat de mettre un terme à sa carence fautive par la mise en place de mesures (…) pour lutter efficacement contre l’orpaillage illégal afin d’en pallier les effets environnementaux, sanitaires et sociaux ». Il est notamment demandé « un programme sanitaire d’ampleur » pour le suivi des populations du haut Maroni, le « renfort des moyens judiciaires et matériels pour lutter contre les activités minières illégales », ou « une stratégie de surveillance permanente élaborée avec les habitants ».
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