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Le gymnase de la halle des sports, à Alençon (Orne), dans le quartier de Perseigne, porte désormais le nom d’Alice Milliat. Vendredi 8 mars 2024, à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, la municipalité a ainsi nommé ce bâtiment public en hommage à la pionnière du sport féminin qui a bataillé pour que les femmes participent aux Jeux Olympiques au début du XXe siècle.
Une militante acharnée
Alice Milliat est née le 5 mai 1884 à Nantes. Pour beaucoup, ce nom peut ne rien évoquer. Décédée le 19 mai 1957 à Paris, elle est enterrée au cimetière Saint-Jacques à Nantes dans une tombe sans pierre tombale, à sa demande. Ce n’est qu’en 2020 que ses arrière-petits-cousins ont décidé de faire graver une plaque funéraire à son nom. La notoriété de leur aïeule était alors grandissante, notamment depuis la création en 2016 de la fondation Alice Milliat, la première en Europe dédiée au sport au féminin. Alice Milliat est considérée comme la grande oubliée du sport français.
Née de parents épiciers, la jeune fille épouse, à 20 ans, Joseph Milliat à Londres. Veuve seulement quatre ans plus tard, elle revient vivre en France et c’est à Paris qu’elle commence à faire du sport, notamment l’aviron. Très vite, elle s’investit au sein du club Fémina Sport dont elle devient la présidente en 1915.
Veuve, sans enfant, elle prend en 1919 la présidence de la Fédération des sociétés féminines sportives de France. C’est à cette époque que débute ce qui deviendra son combat : la participation des femmes aux Jeux Olympiques. Elle insiste auprès du Comité international olympique (CIO) pour inclure des épreuves féminines d’athlétisme. Mais Pierre de Coubertin, le président, lui oppose des refus systématiques.
Alice Milliat ne baisse pas les bras et créé un premier meeting féminin international à Monaco en mars 1921 et lance les premiers Jeux mondiaux féminins à Paris le 20 août 1922. Elle est alors la présidente de la Fédération sportive féminine internationale. En 1928, après la démission de Pierre Coubertin, elle obtient la participation des femmes aux épreuves d’athlétisme aux JO d’Amsterdam. Elle fera d’ailleurs partie des arbitres, une première.
Mais sa fédération s’essouffle, faute de moyens financiers. Elle est absorbée par la Fédération internationale d’athlétisme en 1935.
Épuisée, Alice Milliat quitte la scène sportive et devient dactylographe.
Les femmes aux JO : un marathon
Seules 22 femmes ont participé aux JO de Paris en 1900, autorisées à concourir dans quelques épreuves.
Ce n’est que dans les décennies 1970 et 1980 qu’est encouragée la présence des femmes aux JO. Depuis 1991, toute nouvelle discipline aux JO doit obligatoirement comporter des épreuves féminines, en 2012, ceux de Londres sont à 44 % féminins.
A Paris, cette année, pour la première fois dans l’histoire de l’olympisme, les JO 2024 compteront exactement le même nombre de places de qualification pour les femmes et pour les hommes (soit 10 500 athlètes).
Remédier à une « injustice »
En mars 2021, à la Maison du sport français, qui abrite le siège du Comité national olympique, sa statue a été inaugurée face à celle de Pierre Coubertin. Un joli tour du destin… De nombreuses villes ont décidé de rendre dommage à Alice Milliat. La municipalité d’Alençon en fait désormais partie.
Son nom est apparu à l’occasion de la concertation sur la féminisation des espaces et bâtiments publics, lancée par la Ville le 8 mars 2022 (seulement 3 % des rues alençonnaises portaient alors le nom d’une femme). Un projet initié par le collectif des droits des femmes de l’Orne et soutenu par Patricia Roussé, conseillère municipale en charge de la délégation à la lutte contre les discriminations, les exclusions et les violences faites aux femmes.
Cette dernière le reconnaît : elle n’a découvert l’histoire d’Alicia Milliat que tout récemment, « avec beaucoup d’émotion ».
C’est anormal qu’une telle femme soit tombée dans l’oubli, ainsi que ses combats face à Pierre de Coubertin. Elle n’a eu aucune récompense de son vivant, c’est injuste. A nous de reconnaître tout cela.
Présent à l’inauguration, Joaquim Pueyo, le maire, a évoqué le square Gisèle Halimi, le relais petite enfance André Née, le pôle de santé Simone Iff. Sans oublier l’école de Courteille, qui sera nommée Gabrielle Grandière, l’auteure de Pirouette-Cacahuète et ancienne institutrice dans cette même école.
Le collectif des droits des femmes était présent, à cette inauguration. Pour Christine Coulon, le combat est loin d’être terminé. « On se félicite, évidemment, de cette nomination », a-t-elle indiqué. « Mais ce n’est pas à la hauteur de nos ambitions, il reste tant à faire avant d’atteindre la parité pour les noms des rues. C’est long. »
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