Le saviez-vous? Un obélisque de trois mètres a été érigé en l’honneur d’un prétendu « grand maître », au cimetière de l’est, à Nice. Des pèlerins venus d’Amérique du Sud s’y recueillent encore régulièrement.
Un gourou? « Non, non et non! », soutiennent ceux qui entretiennent son culte. Serge Raynaud, mort à Nice en 1962, qui se faisait appeler « pontife souverain de la direction du monde » et attendait « l’âge d’or de l’Aquarius », est juste un être à part, glorifient-ils. Les mauvaises langues n’ont juste pas compris sa « pensée à 360 degrés ».
46 ans, mais des doctorats en veux-tu en voilà
Qui d’autre que lui aurait pu décéder à l’âge de 46 ans, en ayant eu le temps d’être « meilleur élève d’Europe » à douze ans, d’empiler les doctorats inaccessibles au commun des mortels (médecine, biologie, théologie, philosophie…), de prédire l’avenir, d’écrire des dizaines de livres mélangeant sciences, religion, astrologie et yoga ou encore de devenir un peintre « incomparable »?
Serge Raynaud de la Ferrière, multiplie les diplômes (tous en même temps?), parcourt « les cinq continents », fait des milliers de conférences, avant d’atterrir à Nice, avenue d’Anvers, dans une chambre où il aurait écrit son œuvre.
Un esprit et une connaissance hors du commun, qui lui aurait permis de prédire l’avenir, mais pas de déceler le diabète qui aurait provoqué son décès. Un trou dans la raquette?
Une association entretient sa pensée « à 360 degrés »
« La pensée du Docteur de la Ferrière est à 360 degrés, éclairent Francesca Bradamante et Vanessa Perriolat, présidente et secrétaire de l’association pour la préservation de l’œuvre du Docteur de la Ferrière en Europe, basée à Nice. Il fait la synthèse de toutes les croyances. Il prône un monde de tolérance, de vérité et de paix en se basant sur tous les savoirs ».
Hors de question de parler de « gourou ». Bien qu’il ait créé au Venezuela la Grande fraternité universelle – qui prône « la fusion de toutes les sectes, associations, sociétés humanitaires, philosophiques, scientifiques, artistiques, ésotériques, religieuses et initiatiques ».
« On voudrait un musée à Nice »
Serge Raynaud, le « pontife souverain de la direction du monde », prétendait avoir obtenu cinq doctorats.
(DR)Nice Matin.
Mais cette organisation n’a plus rien à voir avec eux, soutient Francesca. « C’est le côté mystique, ésotérique, qui est mal compris. Oui, il y a un côté spirituel, c’est un grand maître, il a des titres de franc-maçonnerie. Les premières personnes qu’il a trouvées n’avaient pas compris l’amplitude de son œuvre. Plusieurs ont déformé sa pensée, presque comme une secte. »
D’autres éléments s’apparentent à de l’escroquerie. Sa femme, Louise Baudín Raynaud l’accuse dans son livre (« Los Falsos Maestros » /Les faux maîtres) d’avoir pondu son nom à particule et de n’avoir aucun diplôme. « On n’a jamais voulu répondre à ces polémiques. Mais on voudrait avoir un musée à Nice pour exposer tous ces documents, mais aussi ses œuvres ». Où sont ces labels Unesco, que Reynaud a clamé toute sa vie? « Aujourd’hui, vous n’allez plus trouver les institutions dans la liste, les règles ont changé. »
Plusieurs dizaines de milliers d’euros pour l’obélisque
La communauté de fidèles de Serge Raynaud est inexistante à Nice, en dehors de la secrétaire de l’association. Mais la tombe, elle, reçoit des visites. Il faut dire que la pensée aurait essaimé dans dix-huit pays du monde. « Des gens viennent de toute l’Amérique du Sud, en pèlerinage, rapporte Jean Giordano, le gardien en chef. Ça m’a toujours intrigué. Apparemment, il a fait énormément de bien là-bas. »
En 2016, l’association a voulu marquer le coup, en customisant la tombe de cet obélisque. Plusieurs dizaines de milliers d’euros. Une centaine de personnes étaient présentes, ce jour-là. Dont des représentants de la mairie, qui se montre bienveillante depuis longtemps.
« Ces gens ne m’ont pas semblé en transe »
En 1981, elle a remis à David Ferriz Olivares, principal disciple de Serge Reynaud, la médaille de la Ville. Pour le centenaire de la naissance du maître, elle était présente, par le biais de l’adjoint à l’état civil, Auguste Vérola. « Il y avait une belle cérémonie, avec énormément de monde de tous les continents, se souvient-il. J’étais allé les accueillir au nom de la ville, c’est tout. Ce n’est pas tellement un gourou: je n’ai jamais eu de problèmes avec eux, ces gens ne m’ont pas semblé en transe ».
Aujourd’hui, les disciples continuent de vouloir propager l’œuvre du « maître » à Nice. Notamment à travers la fondation Elic, qui a glané des conférences ou des ateliers nutrition auprès de la Ville ou de l’Université Nice Côte d’Azur.
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