Coopération transfrontalière : la grande oubliée des politiques françaises de préservation de la biodiversité en Guyane
La France a une importante responsabilité écologique en Guyane en raison des espèces protégées présentes dans ses eaux, qu’elle s’est engagée à protéger à travers plusieurs conventions internationales. Sa responsabilité est majeure concernant la tortue luth, espèce classée en voie de disparition : dans l’Ouest Guyanais, qui hébergeait à la fin des années 1990 40% de la population mondiale reproductrice, le nombre de pontes est passé de 5000 par an pendant les années 2000 à 106 en 2023, soit un déclin de 97%.
La pêche illégale étrangère est en grande partie responsable de ce déclin, en raison de leurs filets maillants dérivants de plus de 4km de long qui sont des pièges pour les grands vertébrés. Les flottes de pêche originaires du Guyana, du Suriname et du Brésil sont observées quotidiennement dans les eaux territoriales françaises..
Alors qu’une évaluation officielle de cette pression sera rendue publique en juin – la dernière remontant à 2012 ce qui soulève un problème de transparence des données – , ce samedi 23 mars, les équipes du WWF France et du Comité des Pêches ont survolé l’Ouest guyanais et pu constater la présence de 39 tapouilles surinamaises dans les eaux territoriales françaises. En surexploitant la ressource halieutique, elles mettent à risque les principaux stocks ainsi que la souveraineté alimentaire du territoire, et placent en grande difficulté la filière locale.
“Aujourd’hui, l’orpaillage illégal et la pêche illégale perdurent à haute intensité, et sont traités comme s’il s’agissait de problématiques locales, entraînant des réponses organisées à la seule échelle de la Guyane française. Or, il est clairement établi que ces pressions trouvent leurs origines dans les pays voisins (Suriname et Brésil), et y bénéficient d’une logistique bien rodée, qui s’est depuis longtemps adaptée aux efforts de lutte français.
En mer, les navires illégaux continuent de rentrer jusqu’à 100 km à l’intérieur des eaux françaises. Sur terre, des sites miniers illégaux se trouvent maintenant à moins de 50 km de l’ensemble des grandes villes (Cayenne, Kourou, Saint Laurent du Maroni), tout en demeurant très installés au sein du Parc amazonien de Guyane (112 sites début 2024).
En complément du nécessaire renforcement des efforts de lutte locaux, l’opportunité majeure d’inversion de ces tendances réside dans la responsabilisation des pays directement concernés par le maintien de ces fléaux : le Suriname et le Brésil.” – Laurent Kelle, responsable du bureau Guyane du WWF France
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