Publié le 5 oct. 2023 à 17:30
Et ça recommence ! L’Argentine va, à nouveau, élire un total zozo à sa présidence le 22 octobre. Le grand favori se nomme Javier Milei et ce populiste « libéral » (faut bien inventer du neuf dans cette catégorie épuisée par tant d’échecs !) n’a rien trouvé de mieux que de promettre de « dollariser » son pays, c’est-à-dire de remplacer le peso par le dollar américain.
Il n’y a pas un économiste sur terre pour considérer que « cette arme contre l’inflation », dixit le zozo, a la moindre chance de marcher, mais tous sont convaincus qu’elle va, à coup sûr, faire s’effondrer la richesse nationale. La perspective de son élection a déjà fait fuir les capitaux.
Populisme catastrophique
Le Venezuela, où la « révolution bolivarienne » est en route depuis la nomination d’Hugo Chavez en 1998, remplacé après son décès par Nicolas Maduro, est plongé dans un populisme économique catastrophique.
Le régime, que Jean-Luc Mélenchon a pris pour modèle pour sa « démocratie participative » (en clair la milice) et ses « nationalisations », a provoqué une chute de son PIB par tête (la richesse moyenne de chaque habitant) de… 73 % entre 2008 et 2020 !
Dans toute l’histoire moderne, c’est un record mondial. Seuls les bombardements sur l’Allemagne de Hitler de 1943 à 1945 ont été aussi destructeurs. Un Vénézuélien d’aujourd’hui a moins de pouvoir d’achat que son compatriote d’il y a un siècle.
Depuis 1870 que les statistiques existent, l’Amérique latine est le seul continent à avoir connu 53 « rares désastres » économiques : une chute du PIB par tête de plus de 10 %, selon José Ursua et Alejandro Werner , auteurs d’une étude sur la mise en perspective historique de la crise du Covid-19. Le seul où l’on observe au total 30 « décennies perdues » dans ses 8 plus grands pays, observés dans l’étude.
Une décennie perdue à cause du Covid
Actuellement, l’Amérique latine n’est toujours pas sortie d’une nouvelle décennie perdue, causée par le Covid. Le virus a frappé très fort – à cause de l’état désastreux des systèmes de santé – et simultanément les pays de cette région très affaiblie, puisqu’avant la pandémie, son PIB par tête avait déjà reculé de 5 %.
Conséquence : le PIB par tête a reculé en Argentine de 2015 à 2020 de 17,8 % ; au Mexique de 2018 à 2020 de 9,9 % ; au Pérou de 2018 à 2020 de 12,6 %. L’impact économique du Covid est supérieur à toutes les précédentes crises depuis la grippe des années 1918-1920, y compris donc la grande crise des années 1930.
Au Chili, le virus est plus négatif qu’en 1973, au Brésil qu’en 1990, en Argentine qu’en 2001 et au Mexique qu’en 2005. La maladie a été surmontée ailleurs, toujours pas en Amérique latine où sa gestion a été le plus souvent, comme au Brésil sous Jair Bolsonaro, erratique.
Prix des matières premières
Quelles sont les mystérieuses raisons qui coulent les économies sud-américaines ? Vaste débat parmi les économistes. La première, toujours avancée, est le prix des matières premières. Quand l’économie mondiale fait flamber les cours du cuivre, de la viande ou du soja, les pays engrangent des recettes, mais c’est tout l’inverse quand les cours chutent. Cette explication vaudrait pour la moitié des « désastres », disent les auteurs de l’étude.
L’autre explication est l’influence du dollar, dont les variations et les taux d’intérêt se répercutent avec violence sur le Sud. Les épargnants sud-américains ont toujours eu l’irrépressible habitude de placer leur épargne dans les banques de Miami, où l’on parle espagnol.
La puissance yankee et les interventions de Washington rendent sans aucun doute la vie économique plus difficile, et l’autonomie encore plus, pour le sud du continent. Mais si ces deux explications comptent, elles ne suffisent pas, loin de là.
Corruption et manque d’investissement
Les auteurs déplorent des causes « internes » au malheur sud-américain : une mauvaise qualité des institutions, la corruption, l’absence de système social solide (on le voit sur la santé), un manque considérable d’investissement et des efforts très insuffisants pour les écoles et la formation. Autrement dit, le mal a un nom : il se nomme « la politique ».
La place exagérée des militaires, nuls en économie et très souvent corrompus, n’excuse pas les gouvernements civils, qui ont alterné de gauche à droite avec trop de facile radicalité, et excuse encore moins les électeurs qui les ont choisis comme s’ils étaient habités par une étrange attirance pour les zozos populistes.
Le populisme a été inventé en Amérique latine, en tout cas dans sa version vaudevillesque, parfois plaisante à l’oeil littéraire, toujours désastreuse pour l’économie. Il serait temps qu’elle sorte de cette pensée magique. Il serait surtout temps que nous, en France, on ouvre les yeux sur l’abîme où nos populistes veulent nous y attirer.
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