Chris Mellon, ex-responsable du Pentagone, sur les ovnis : « L’hypothèse extraterrestre est crédible »
Jamais la question des ovnis, appelés plus pudiquement phénomènes aérospatiaux non identifiés (PAN), n’a été prise aussi au sérieux qu’aujourd’hui… aux États-Unis. Ce week-end, c’est pourtant bien à Paris, à la Sorbonne, que des experts internationaux du sujet (scientifiques, pilotes, ingénieurs…) se rencontrent pour partager les résultats de leurs recherches. Parmi les intervenants les plus attendus du congrès Écho-Event, Christopher Mellon, secrétaire adjoint à la Défense pour le renseignement, du temps des présidents américains Bill Clinton et George W. Bush, qui a participé activement aux révélations de ces dernières années.
Le sujet des ovnis est devenu récemment beaucoup plus visible aux États-Unis. Même la Nasa s’attaque au problème. Pourquoi ?
CHRISTOPHER MELLON. Principalement parce que Congrès (le Parlement américain) s’en est emparé. Des pilotes de la Marine ont persuadé les sénateurs des commissions sénatoriales des forces armées et du renseignement, notamment au moyen de vidéos, que ces phénomènes étaient réels et qu’il y avait des intrusions dans notre espace aérien. C’est donc devenu une question de sécurité nationale. Et l’un de ces sénateurs (Bill Nelson) est devenu par la suite directeur de la Nasa. Quand il y est entré, il était déjà convaincu qu’il s’agissait d’un problème sérieux.
Il y a eu des auditions au Congrès et d’autres sont programmées. Est-ce un point de bascule ?
Absolument, c’est une percée. Cette question était auparavant traitée avec mépris et c’était presque une hérésie d’en parler au sein du gouvernement ou dans le monde universitaire. Maintenant, le Dr Avi Loeb de Harvard commence à lui donner une certaine crédibilité. Le gouvernement aussi a vraiment changé la façon de l’aborder. La question est maintenant : d’où viennent ces choses ? De quoi s’agit-il ?
Pourquoi les États-Unis sont-ils le seul pays où les politiciens semblent préoccupés par les PAN ?
Nous avons peut-être davantage d’intrusions dans notre espace aérien ou nous en sommes peut-être plus conscients. De plus en plus d’observations sont signalées aux États-Unis, mais quand on regarde les données ici en France, par exemple, il y avait autant d’observations par habitant dans les années 1950 que chez nous. Et votre gouvernement s’implique avec le Geipan (le bureau de l’agence spatiale française, le Cnes, chargé d’analyser les PAN). Il y a une prise de conscience croissante au niveau international : le gouvernement japonais collecte actuellement des informations, certains pays d’Amérique du Sud prennent également la question au sérieux…
En 2016, vous avez dit douter que le gouvernement cachait des informations sur les ovnis. Un an plus tard, le New York Times révélait l’existence d’un programme secret du Pentagone visant à étudier les PAN, avec à l’appui trois vidéos fournies… par vous-même. Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ?
J’ai quitté le gouvernement avant la mise en place de ce programme. Quand j’ai commencé à écrire sur cette question en 2015-2016, j’essayais d’aider une organisation scientifique à collecter des fonds pour déployer des instruments permettant de collecter des données. J’ai alors eu connaissance de ce programme et obtenu beaucoup de nouvelles informations. C’est là que mon point de vue a considérablement évolué.
Quel est votre intérêt aujourd’hui à parler publiquement des ovnis ?
J’en ai deux. Le premier, c’est la sécurité nationale. Je suis préoccupé par ce qui se passe en tant que professionnel du renseignement. Lorsque j’ai été confronté à ce problème pour la première fois, notre gouvernement ne faisait rien. On ignorait complètement le problème. Cela rappelait Pearl Harbor et le 11-Septembre, lorsque les agences ne partageaient pas les informations qui auraient pu empêcher ces catastrophes. Le système était cassé. Mais j’ai aussi eu un intérêt presque toute ma vie pour ce sujet, d’un point de vue scientifique. J’essaie donc d’informer le public, de l’aider à mieux comprendre le problème, de le sensibiliser.
Cela reste assez risqué d’évoquer ce sujet souvent moqué. Est-ce que ça vous a isolé ?
Je savais que ça pourrait m’empêcher d’intégrer à nouveau le gouvernement, d’occuper certains postes. Mais je sentais que c’était trop important pour être ignoré. Heureusement, la plupart des gens ont été respectueux, en partie parce qu’il s’agit d’une question de sécurité nationale.
Diriez-vous que la plupart des membres du Congrès sont intéressés par cette question ou s’agit-il d’une minorité ?
Je dirais que la plupart des membres du Congrès sont intéressés ou curieux à ce sujet. Mais ils sont également très, très occupés et ont d’autres problèmes plus urgents, comme le déficit budgétaire. Les membres des comités parlementaires sur les forces armées ou sur le renseignement sont beaucoup plus informés, beaucoup plus impliqués et ont tendance à être plus préoccupés.
L’hypothèse extraterrestre est-elle crédible ?
Je crois que oui. Nous avons des cas si extraordinaires et si bien documentés pour lesquels nous n’avons tout simplement pas de bonne hypothèse alternative… Nous avons des données, des pilotes, des techniciens radar, qui rapportent des choses que nous ne comprenons pas, que nous ne pouvons pas expliquer et qui dépassent de loin les capacités de tout ce qui est fabriqué par l’homme. Alors naturellement, cela pousse à considérer toutes les options.
Un ancien agent du renseignement, David Grusch, a affirmé sous serment que les États-Unis détenaient du matériel d’origine non humaine. Que pensez-vous de ses affirmations ?
Je connais David depuis 2018. Je sais qu’il est crédible. Il a occupé des postes où il côtoyait des personnes qui auraient accès à ce genre d’informations si elles existaient. Je sais qu’il est absolument sincère dans ce qu’il croit. Je ne sais pas s’il a eu un accès direct à des éléments, de ce que j’en comprends, ces informations étaient de seconde main. J’ai, moi-même, plusieurs sources qui disent la même chose. Sans que je puisse présenter une quelconque preuve. Ma position est donc la suivante : il existe des informations crédibles provenant de personnes crédibles et le Congrès devrait enquêter.
Pourquoi les États-Unis auraient caché de telles informations pendant des décennies ?
Si c’est le cas, peut-être par peur de la réaction du public. Imaginez que vous êtes le président des États-Unis et qu’on vous dise qu’on a trouvé une chose dans le désert dont on dirait qu’elle vient d’un autre système stellaire et d’une civilisation différente. Qu’allez-vous faire ? Allez-vous tenir une conférence de presse et dire que les extraterrestres sont ici, mais que nous ne savons pas d’où ils viennent, que nous ne pouvons rien y faire, et bonne journée ? Aucun président ne voudrait faire cela. Vous allez effrayer les gens et vous ne pourrez pas garantir que vous allez les protéger. Dans les années 40-50, lorsque tout cela est censé avoir commencé, il y avait beaucoup de films d’extraterrestres effrayants. Je pense que les gens de cette époque, plus qu’aujourd’hui, auraient peut-être paniqué.
Le leader de la majorité démocrate au Sénat veut davantage de transparence sur d’éventuelles informations concernant des « technologies d’origine inconnue ». Son amendement a-t-il une chance d’intégrer la loi américaine ?
Absolument. Il a déjà été adopté par les sénateurs et maintenant les deux chambres doivent parvenir à un accord sur le texte. Le projet de loi doit ensuite être voté avant d’être soumis au président pour signature. Il se peut qu’il soit légèrement modifié mais je pense que l’amendement a de très bonnes chances d’être adopté.
Quelles seraient les conséquences ?
L’une des dispositions clés est la création d’une commission présidentielle qui examinerait les dossiers des agences liés aux PAN. Et dont les membres recommanderaient au président de déclassifier les documents dont ils pensent que le public a le droit de savoir.
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