la France a encore des progès à faire – Libération

Le Greco, un appendice du Conseil de l’Europe, vient de publier son rapport sur l’Hexagone, entre satisfecit et remontrance.

Bien, mais peut mieux faire. Le Groupe d’Etats contre la corruption (Greco), a rendu le mercredi 10 avril 2024 son deuxième «rapport de conformité» sur la politique française en la matière. Pour en conclure qu’elle «ne se conforme pas suffisamment» à ses précédentes recommandations. La France est certes bien loin d’être le pays le plus corrompu de la planète, mais le diable se niche parfois dans quelques détails.

Le Greco loue certes le travail de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et de l’Agence française anticorruption (AFA), qui épluchent régulièrement les patrimoines et conflits d’intérêts potentiels des décideurs publics, essentiellement les ministres et leurs proches conseillers. Mais il souhaiterait que cette vigilance soit étendue à toute «personne exerçant une haute fonction exécutive» (PHSE, dans son jargon), soit un spectre bien plus large – voire à son conjoint ou enfants, au risque d’une atteinte à la vie privée, comme l’a déjà pointé le Conseil constitutionnel.

Le statut du président de la République

Sur la constitution d’un cabinet ministériel, le Greco regrette que les risques de conflits d’intérêts ne soient pointés que pour les conseillers ayant exercé dans le privé au cours des trois années précédentes. Leur nombre a de fait explosé sous la macronie, avec pas moins de 200 recrutements de ce type après sa réélection en 2022. Mais les fonctionnaires seraient-ils comme par magie à l’abri du risque ?

Le Greco n’hésite pas à s’attaquer à la citadelle élyséenne. Pour regretter que les divers plans pluriannuels de lutte contre la corruption en vigueur dans les ministères ne soient pas «étendus au cabinet du président de la République», histoire d’envoyer «un signal clair au grand public». Il pointe aussi le fait qu’un président récemment élu n’est tenu que de «déclarer» son patrimoine à la HATVP (ainsi qu’en fin de mandat), laquelle ne peut qu’enregistrer sans pouvoir le «contrôler» – à la différence des ministres ou parlementaires.

S’agissant du lobbying, et des risques de collusion entre intérêts publics et privés, le Greco se félicite de la réglementation française, qui oblige les «représentants d’intérêts» à s’enregistrer et mentionner leurs rendez-vous avec les pouvoirs publics. Mais regrette que la réciproque ne soit pas vraie, quand c’est un décideur qui contacte de son propre chef un lobbyiste…

La législation sur les lanceurs d’alerte «substantiellement renforcée»

Comme de coutume, le Greco en remet une couche sur la Cour de justice de la République (CJR), composée paritairement de magistrats et parlementaires, seule habilitée à juger les ministres dans l’exercice de leur fonction. Il promeut plutôt une «juridiction garantissant une totale indépendance et impartialité, non seulement réelle mais aussi perçue comme telle.» En vain à ce jour, ses rapports n’ayant pas de valeur contraignante, tout juste potentiellement infamante.

Une très bonne note pour la fin, à propos de la protection des lanceurs d’alerte, «substantiellement renforcée» par la législation française. Un bémol, toutefois : «Leur accompagnement psychologique et financier reste insuffisant.» D’autant que les saisines du Défenseur des droits, désormais en charge de les accueillir, explosent (134 en 2022, en hausse de 50 %). Mais nul n’est parfait, quoique le Greco enjoigne la France à «prendre des mesures énergiques en vue d’accomplir des progrès tangibles dans les meilleurs délais.»

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