La première fois qu’elle s’est poudré les mains de magnésie, elle n’avait pas imaginé ça, pas rêvé de ça, mais c’était sa destinée. Depuis toute gamine, Kaylia Nemour n’avait d’yeux que pour les Bleues, avec qui elle se voyait incarner cette nouvelle génération tricolore qui collectionne les médailles et fait résonner allégrement la Marseillaise aux quatre coins de la planète. Et, en même temps, pouvait marcher sur les pas de son idole de jeunesse, l’ex-championne française Youna Dufournet.
Mais tout ça n’était finalement qu’une chimère, du moins pour la couleur du justaucorps qu’elle lorgnait. Car des titres, elle en empile fièrement depuis près d’un an : championne d’Afrique à Pretoria, vice-championne du monde aux barres asymétriques à Anvers, deux médailles d’or en Coupe du monde sur le même agrès à Bakou (Azerbaïdjan) et à Cottbus (Allemagne) cette année, pour ne citer que les plus beaux.
« La Fédération française a fait une erreur monumentale »
Mais c’est l’Algérie, nation sportive chez laquelle elle a dû s’exiler par la force des choses après un imbroglio digne d’un scénario hollywoodien avec la Fédération française de gymnastique (FFG), qui récolte aujourd’hui le fruit de cette pépite native de Saint-Benoît-la-Forêt, près de Chinon (Indre-et-Loire). « La Fédération a fait une erreur monumentale, pour ne pas dire impardonnable, assure son entraîneur Marc Chirilcenco. Cela a permis à Kaylia de prendre le temps de travailler les barres asymétriques pendant deux ans. Elle s’est tellement perfectionnée qu’elle en est devenue vice-championne du monde… », poursuit celui qui façonne la gymnaste de 17 ans.
La nouvelle étoile mondiale de la gymnastique a filé entre les doigts de l’équipe de France après un long conflit dont les prémices remontent à fin 2021 quand la FFG souhaitait regrouper toutes les meilleures gymnastes de l’Hexagone à l’Insep ou dans le pôle de Saint-Etienne en vue des JO 2024. Un projet que certaines athlètes d’Avoine-Beaumont, dont Kaylia Nemour, ont refusé, souhaitant rester dans leur club familial et ne pas bouleverser leur préparation.
Les relations entre la « Fédé » et la structure basée à Beaumont-en-Véron ont commencé à se tendre alors que la Franco-Algérienne était, de son côté, en phase de rééducation après avoir subi une opération des deux genoux à l’été 2021 pour soigner une ostéochondrite sévère (une anomalie au niveau des zones de croissance des os et cartilages).
Si son chirurgien a donné son feu vert pour une reprise de la gymnastique en mars 2022, le médecin fédéral Pierre Billard a mis son veto pour protéger l’intégrité physique de la jeune femme, selon la Fédération. « Je ne comprenais pas, j’étais en colère. Je ne faisais plus rien, alors que j’avais la capacité de faire des compétitions, se souvient Kaylia Nemour, qui voyait, à ce moment-là, son ambition olympique prendre du plomb dans l’aile. Je me disais : ’’Mais ça va durer combien de temps ?’’ Faire encore un an sans compétition, je n’aurais même pas pu être prête pour les JO. »
« Je pense qu’au début ça venait d’une bonne intention, puis après tout s’est envenimé. La FFG voulait avoir la main sur tout, mais il n’y a pas eu de dialogue humain. Pendant ses opérations, elle n’a reçu aucun coup de téléphone, que ce soit des dirigeants de la FFG, de l’équipe technique nationale ou du médecin fédéral, explique sa mère Stéphanie Nemour. On n’est pas idiots, il fallait cicatriser ses opérations avant de reprendre. Mais ses kinés avaient suivi tout le processus avec elle, donc quand on a reçu ce mail de refus, on était surpris… »
Du côté de l’instance…
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