REPORTAGE. À Maripasoula en Guyane, commune coupée du monde ou presque

Actuellement, et comme souvent pour les habitants des communes de Guyane desservies uniquement par les airs ou par le fleuve, l’adaptabilité est de mise. Fin septembre, la liquidation de la compagnie Air Guyane actait la fin des vols intérieurs sur le territoire guyanais. Cette situation, couplée à un phénomène de sécheresse, a sérieusement compliqué le quotidien de la population. Alors, quand les vols ont repris le 5 décembre, les habitants ont pu respirer mais à Maripasoula, commune de 10 000 habitants à l’ouest de cette région française située en Amérique du sud, cette reprise n’a pas signé la fin des problèmes.

« Environ 8 tonnes de fret bloquées à Cayenne »

Sur le fleuve Maroni (qui fait partiellement la frontière avec le Suriname), la baisse du niveau de l’eau depuis juillet a rendu particulièrement difficile, voire dangereuse, la circulation de biens et de personnes par voie fluviale. Au passage de certains rapides, il n’est pas rare d’apercevoir des hélices de moteur brisées sur les rochers émergés. En amont du Maroni, plusieurs villages amérindiens Wayana ont été confrontés à un manque d’eau alors que le niveau des nappes phréatiques baissait.

Pour Patrick Valies, président de l’association des commerçants de Maripasoula, le plus gros problème est celui de l’approvisionnement. « Il n’y a pas de vol et les pirogues prennent moins de marchandises », dit-il. Dans les vols qui ont repris le 5 décembre, les marchandises des commerçants et restaurateurs sont absentes. « Il y a environ 8 tonnes de fret qui sont bloquées dans les hangars à Cayenne (chef-lieu de la région », explique M. Valies qui voit dans cette situation un « retour en arrière ».

Maripasoula | OUEST-FRANCE, PHILIPPINE OREFICE

Maripasoula | OUEST-FRANCE, PHILIPPINE OREFICE

800 kg de farine livrés aux boulangeries en hélicoptère

Jusqu’à la reprise des vols par le groupement Guyane Fly, en attendant qu’une solution pérenne soit trouvée pour reprendre la délégation de service public, la collectivité territoriale de Guyane (CTG) avait affrété des avions pour les urgences et même si les modalités de ravitaillement des commerçants étaient floues, certains réussissaient à prendre un peu de place dans les avions. « Là, on n’a aucune information », indique le commerçant.

Ce lundi 11 décembre, ce sont 800 kg de farine qui sont arrivés par un hélicoptère affrété par la CTG pour ravitailler la boulangerie, indique Patrick Valies.

À la pharmacie du bourg, dont dépendent aussi les habitants de Papaïchton, la commune en aval d’un peu moins de 6 000 habitants, le ravitaillement est « aléatoire », indique Glwadys Forsans, pharmacienne remplaçante qui constate qu’aucune réelle organisation n’a été mise en place depuis l’arrêt des vols Air Guyane. Christophe Martinez, le responsable, indique avoir affrété 4 avions et 2 hélicoptères privés depuis juillet, une solution coûteuse.

Patrick Valies, président de l’association des commerçants de Maripasoula. | OUEST-FRANCE, PHILIPPINE OREFICE

Patrick Valies, président de l’association des commerçants de Maripasoula. | OUEST-FRANCE, PHILIPPINE OREFICE

Des prix qui grimpent

Dans l’un des deux libres services officiels de la commune, les prix grimpent depuis juillet observent les habitants. Dans les rayons, la bouteille d’eau de 1,5 litre est à 3,20 €, la boîte de 10 steaks hachés surgelés à 18 €, les 500 grammes de haricots rouges tutoient les 4 €. « C’était déjà cher avant mais là, ça a doublé » souffle Candice, qui tient un snack en bord de route, « et nous, on ne peut pas augmenter nos prix sinon on a encore moins de clients », poursuit-elle.

Alors la solution, c’est d’aller « en face », à Albina 2 au Suriname. Comme pour la majorité des communes françaises du Maroni, fleuve frontalier, une ville jumelle est installée côté Suriname composé majoritairement de commerces proposant des produits à prix moins élevés. S’il est courant pour la population de s’y rendre peu importe le contexte, dans la situation actuelle, la présence de ces magasins semble être une bouffée d’air frais « même s’ils commencent aussi à augmenter les prix », nuance la restauratrice.

Et si l’envie prend les habitants de faire un tour sur le littoral, il faudra attendre. Sur le site internet de la compagnie aérienne, aucune place n’est disponible pour se rendre à Cayenne. La compagnie, qui n’a qu’un seul avion pour le moment, devrait étoffer sa flotte dans les prochains jours et être capable de proposer davantage de vols. La patience et l’espoir restent pour l’instant de mise du côté de Patrick Valies qui prévient tout de même : « On a pu tenir jusqu’à maintenant mais on ne sait pas comment on va tenir dans les prochaines semaines et les prochains mois si ça continue ainsi. »

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